Le masque

 Alors que beaucoup attendent sa fin après l'avoir tant espéré, le jugeant à jamais inutile, disgracieux, associal, bien vite rangé au rang des ennemis de la liberté individuelle qui s'affale désormais en terrasse des cafés, à l'ombre des parasols, serais-je le seul qui, malgré soi, je voudrais le croire, regrette déjà ce masque pandémique ?

Il donnait, c'est vrai, des signes qui me parlent au-delà de l'obligation de le porter. Imaginez ce qu'il disait derrière le bleu ciel presqu'uniforme. Je te protège, tu me protéges, nous nous protégeons. Fraternité ! Solidarité ! 

Qu'en sera-t-il demain ? 

Ils donnait à vos yeux une flamme en reflet de vos âmes, comme un petit air mystérieux, une douceur inconnue où j'aimais à me perdre. Il y a tant à lire dans les yeux qui disent tout haut, tout fort, ce que les lèvres taisent trop souvent de colère, de tendresse ou d'interrogation et de surprise ! Le regard ne ment pas: il scrute, fixé à vos yeux, dévisage sans vergogne, devine, soupèse, transperce, encourage; il fuit parfois, timide ou fourbe, suspendu dans le vide. Plein de larmes, plein d'éclats, le regard attire le regard son frère et l'invite à découvrir ce qui se cache derrière le masque...  On n'oublie jamais un regard, mais un visage ? 

Notre masque pandémique aura eu ce mérite de redonner vie à nos yeux et de leur rendre la parole; il a ce pouvoir de dire sans bruit les mots qui naissent dans le silence de nos cœurs, bien mieux que nos lèvres si bavardes.

Pour tout ce qui était caché et que personne ne veut voir, merci ! 


01 juillet 2021. Centre de vaccination, en attendant ma dose. 



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